L’ancien ministre de la Justice Koen Geens mal informé

HRWF (12.03.2021) – Lors d’une conférence en ligne sur les « Limitations de la liberté religieuse en Europe » organisée du 4 au 6 mars par deux universités européennes [1], le panéliste belge représentant Human Rights Without Frontiers (HRWF) a déclaré que l’ancien ministre de la Justice Koen Geens avait été mal informé au sujet du rapport du CIAOSN à propos des abus sexuels et des Témoins de Jéhovah.

 

Le 30 novembre 2018, le CIAOSN a clôturé un rapport de 28 pages [2] sur la gestion des abus sexuels sur des mineurs au sein de l’organisation des Témoins de Jéhovah et l’a transmis au Parlement fédéral avec la recommandation de créer une commission d’enquête parlementaire sur cette question.

 

Dans son rapport [3], le CIAOSN a justifié le bien-fondé de sa décision comme suit :

 

« En juin 2018, le CIAOSN a reçu une notification selon laquelle trois des 286 témoignages reçus par la Fondation ” Reclaimed Voices ” aux Pays-Bas concernent des faits qui auraient eu lieu en Belgique. A partir de juin 2018, le CIAOSN a reçu plusieurs témoignages directs et indirects de personnes affirmant avoir subi des violences sexuelles au sein de l’organisation des Témoins de Jéhovah en Belgique lorsqu’elles étaient enfants. Ces témoignages suggèrent que la gestion des abus sexuels en Belgique est similaire à celle d’autres pays. »

 

Un membre du conseil d’administration de Human Rights Without Frontiers (HRWF) parlant le néerlandais a contacté Reclaimed Voices aux Pays-Bas pour vérifier la crédibilité de ces informations et obtenir plus de détails sur les trois cas présumés d’abus sexuels en Belgique.

 

Dans sa réponse, le responsable de Reclaimed Voices aux Pays-Bas a démenti une telle information rendue publique en Belgique, déclarant dans une correspondance privée datée du 10 février 2021 :

 

« Les informations contenues dans le rapport du CIAOSN ne sont pas correctes. Le 29 mars 2019, nous avons envoyé un courriel à Mme Kerstine Vanderput au sujet de cette inexactitude. À ce moment-là, il a été porté à notre connaissance que Koen Geens, ministre de la Justice (CD&V), avait déclaré sur Radio 1 en Belgique : ‘C’est le CIAOSN lui-même qui s’est rendu aux Pays-Bas pour trouver ces informations et qui a déclaré que parmi les 286 plaintes néerlandaises, il y avait trois plaintes belges’. Des propos similaires ont été tenus à la télévision dans l’émission ‘Van Gils & Guests’. Dans les médias néerlandais, nous avons seulement témoigné de la situation aux Pays-Bas. Les chiffres qui ont été mentionnés sont uniquement des victimes présumées d’abus aux Pays-Bas [4]. »

 

De plus, Aswin Suierveld, membre fondateur de l’association néerlandaise, a déclaré dans une interview datée du 30 août 2020 et disponible sur YouTube [5] qu’en fait ce n’était pas environ 300 plaintes mais seulement 70 à 90 témoignages, bien qu’elle ne les ait pas vraiment comptés. Les 200 restantes émanaient de personnes qui avaient entendu parler d’une histoire qui s’était produite dans leur congrégation, dans leur famille ou parmi leurs proches.

 

Le deuxième argument avancé par le CIAOSN pour justifier la création d’une commission d’enquête parlementaire est qu’il a reçu d’autres témoignages « directs ou indirects ».

 

Aucun détail supplémentaire n’est disponible dans leur rapport, tel que le nombre de témoignages « directs et indirects » reçus par le CIAOSN, le traitement méthodologique et statistique des données, le type de sources (témoignages de première ou de seconde main), la nature des abus sexuels, le contexte des faits allégués (abus dans les familles ou dans un cadre institutionnel), la période de temps des infractions présumées (les cinq ans, les dix ans, les vingt dernières années ou plus).

 

Les membres du Parlement fédéral devraient être mis au courant de ces détails avant de prendre une décision et l’opinion publique se doit également d’être informée en toute transparence.

 

Notes

 

[1] Sigmund Neumann Institute for the Research on Freedom, Liberty and Democracy (Allemagne) en coopération avec le Center for Regional and Borderlands Studies/Institut de sociologie de l’Université de Wrocław (Pologne).

 

[2] Titre Officiel : “Signalement sur le traitement des abus sexuels sur mineurs au sein de l’organisation des témoins de Jehovah” du 30 novembre 2018. A la fin du mois de février, le rapport n’était toujours pas disponible sur le site Internet du CIAOSN. HRWF l’a obtenu d’un autre chercheur travaillant sur cette question. Selon le Parlement fédéral belge, il s’agit d’un rapport intermédiaire. (voir https://www.ciaosn.be/54K3713001.pdf).

 

3] Ce rapport se compose de quatre parties :

Partie 1 : L’organisation des Témoins de Jéhovah (pp 1-4)

Partie 2 : Etat des lieux dans 13 pays sur les initiatives dénonçant les procédures internes des Témoins de Jéhovah dans les cas d’abus sexuels sur mineurs (pp 6-10)

Partie 3 : Etat des lieux en Belgique (pp 12-14)

Partie 4 : Conclusions (pp 15-17)

Annexes (pp 18-28)

 

La partie consacrée à la Belgique ne comporte que deux pages de brèves descriptions de sept cas ou rapports présumés, publiés dans les médias belges en 20 ans, entre 1996 et 2017.

 

[4] Extrait du mail de “Reclaimed Voices”: “De informatie in het rapport van het IACSSO is incorrect. Wij hebben op 29 maart 2019 mevrouw Kerstine VanderPutte over deze onjuistheid gemaild. Het viel ons destijds op dat Koen Geerts, minister van Justitie (CD&V) daags ervoor in België bij radio 1 het volgende meldde: ‘Het is het IACSSO zelf die in Nederland informatie is gaan halen en heeft vastgesteld dat van die 286 Nederlandse klachten er drie Belgische waren’. Iets soortgelijks werd op tv gezegd, bij Van Gils & gasten. Wij hebben in de Nederlandse media steeds alleen gecommuniceerd over de Nederlandse situatie. Aantallen die genoemd zijn betreffen alleen (vermeende) slachtoffers van misbruik in Nederland.”

 

HRWF note: Kerstine Vanderput est la Directrice du CIAOSN. Van Gils & Gasten est un programme de la télévision flamande.

 

[5] See https://www.youtube.com/watch?v=7ayJU4BtcC4

 

Traduction du communiqué de presse d’origine publié en anglais : CAPLC